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Ski MOJO : Comment l’exosquelette permet de repousser les limites de son propre corps


Du haut de ses 72 ans et de la piste bleue, François s’élance. « Allez ! » Sans autre difficulté que la visibilité réduite en ce jour de purée de pois, il enchaîne les virages à bon rythme, s’offre même quelques pointes de vitesse. De là où nous l’observons, c’est-à-dire à une bonne quinzaine de mètres en arrière (on a un peu de mal à suivre la cadence, avouons-le), le septuagénaire ressemble à un skieur comme les autres.


Comme les autres ? A un détail près : François porte aux jambes un exosquelette. Un équipement qui s’enroule autour des jambes « en cinq minutes » et dont le ressort absorbe une partie du poids du skieur - un tiers, selon le fabricant de l’appareil. Dans le cas de François, grand gaillard de 90 kilos, la perte de poids ressentie se mesure donc à environ 30 kilos.


Un bénéfice considérable pour le retraité, qui souffre du genou depuis une rupture des ligaments croisés subie sur un terrain de foot il y a quatre décennies de cela. Soignée à l’époque avec une immobilisation de la jambe, cette blessure a été le point de départ d’un parcours du combattant médical marqué par de nombreuses opérations, dont une ostéotomie à 50 ans.


« Il y a deux ans, j’avais décidé d’arrêter le ski tellement la douleur était importante. Et c’est à ce moment-là que j’ai découvert cet exosquelette... »

François multiplie les éloges à l’égard de cet engin qui lui fait « oublier complètement son genou » et lui permet de « skier comme avant ». Quid des sensations ? Le Grenoblois, qui a pratiqué le ski en compétition, indique que l’exosquelette ne l’autorise pas à réaliser les acrobaties de sa jeunesse. « En revanche, pour le ski normal où on reste avec les deux skis sur la piste, je ne ressens pas de différence fondamentale. »


La croissance de l’exosquelette

François participe aux premiers « championnats du monde de ski augmenté », une compétition non-officielle qui réunit à l’Alpe d’Huez une quarantaine d’utilisateurs d’exosquelettes. Parmi eux, de nombreux séniors, mais aussi quelques personnes en situation de handicap. A l’image de Nabil, amputé d’une jambe après un accident de moto, qui témoigne de sa sensation de « bien-être » à l’arrivée du slalom. « A une jambe, (skier) est difficile. L’exosquelette m’aide vachement. »


Soutenu par l’ancienne championne de skicross Ophélie David, l’événement est à l’initiative de Gabriel Castelain, qui distribue en France les exosquelettes de la marque anglaise Ski-Mojo. Il vante la croissance du marché : partie de zéro il y a cinq ans, l’entreprise revendique aujourd’hui plus de 7 000 exosquelettes dans les montagnes de l’Hexagone, « dont entre 1 000 et 1 500 vendus lors des seules vacances de Noël 2019 ». Le tarif s’élève à 600 euros, mais l’équipement peut également se louer à moindre coût dans certaines stations, au même titre qu’un accessoire de ski traditionnel.


L’industrie du ski peut voir d’un bon œil l’arrivée sur les pistes de ces skieurs « augmentés » : à l’heure où les 15-24 ans se désintéressent des sports d’hiver, jugés ringards et hors de prix, les stations ont tout intérêt à ce que les clients fidèles comme François ne souffrent pas trop des jambes... et puissent continuer de skier toujours vieux.


Vers une meilleure qualité de vie ?

« Le ski sollicite particulièrement les membres inférieurs. Les articulations sont très sollicitées par les impacts et les changements de direction », analyse le chirugien orthopédiste Philippe Loriaut, spécialiste du sport et de l’arthrose. A ses yeux, l’exosquelette permet de diminuer les « contraintes de stress sur les ligaments et les muscles ». Une personne trop âgée pour se faire opérer, ou bien un patient en phase de reprise après une opération pourra utiliser un exosquelette avec profit, indique-t-il.


Philippe Loriaut précise cependant que l’exosquelette ne dispense pas de l’opération chirurgicale lorsque celle-ci est envisageable, et souligne que cet appareil ne doit pas constituer une fin en soi :


« Plutôt qu’utiliser un exosquelette pour palier une insuffisance musculaire, il est préférable d’avoir une bonne condition physique et une bonne musculature. »


Malgré cette réserve, le chirurgien voit d’un bon œil le développement des exosquelettes et leur possible impact dans notre santé du futur : « Les progrès de la médecine et des ingénieurs permettent à chaque fois de prolonger davantage l’espérance de vie, et surtout de la qualité de vie. »

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