De la neige en montagne dès novembre : ces stations françaises qui font le pari du blanc artificiel
- Arcs 1800
- 4 nov.
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Alors que l’automne peine à céder la place à l’hiver, certaines stations françaises ont déjà chaussé leurs skis… ou presque. À Super-Besse, dans le Puy-de-Dôme, les visiteurs découvrent des pentes immaculées au cœur d’un paysage encore vert. Derrière cette vision surprenante, se cache une stratégie bien rodée : produire de la neige artificielle pour sécuriser le début de saison.
De la neige à 20 °C : une scène surréaliste à Super-Besse
Un air de printemps, des enfants en doudoune et… des batailles de boules de neige. À la mi-octobre, la station auvergnate de Super-Besse a sorti les canons – ou plutôt les compresseurs – pour recouvrir ses pistes de blanc.
« Je ne pensais pas voir de la neige à cette période », sourit une mère de famille, tandis que ses enfants s’amusent sous un soleil de 20 degrés.
Cette neige n’a pourtant rien de naturel : elle provient d’un système innovant capable de produire 28 m³ de neige par jour, sans attendre le gel.
L’eau, pompée dans un lac voisin, est refroidie avant d’être transformée en givre puis projetée en fins copeaux par de puissants ventilateurs. Résultat : de véritables tas de neige, stockés à l’ombre jusqu’à l’hiver.
Une stratégie assumée pour sécuriser la saison
Ces réserves de neige permettront à la station d’ouvrir dès la mi-décembre. Un enjeu crucial, selon Lionel Gay, maire de Besse-et-Saint-Anastaise :
« Cette neige garantit des cours de ski, des recettes et donc la possibilité de continuer à investir dans la montagne. »
Avec 3 millions d’euros investis dans la modernisation du domaine, Super-Besse mise sur la fiabilité plutôt que sur la météo. « Ce dispositif reste limité au bas des pistes, mais il nous assure une exploitation pour les vacances de Noël », explique Vincent Gatignol, directeur d’exploitation, à France Bleu.
Il reconnaît que la technique est énergivore, mais défend son faible impact hydrique : « L’eau retourne au lac à la fonte, avec seulement 3 à 5 % d’évaporation. »
Entre transition écologique et survie économique
À l’heure où le réchauffement climatique fragilise les stations de moyenne montagne, Super-Besse tente de concilier tradition et adaptation.
Outre la neige, la diversification est déjà en marche : tyroliennes, luges quatre saisons, randonnées estivales… L’été dernier, ces activités ont généré près de 3,3 millions d’euros, soit un quart du chiffre d’affaires annuel.
« On prépare un futur où il pourrait ne plus y avoir de neige dans vingt ou trente ans », admet le directeur.
Les installations de production ressemblent à de grands conteneurs industriels. « C’est comme un congélateur dont on laisse la porte entrouverte », image Gatignol. Le givre s’y forme, est broyé puis projeté pour constituer des amas de plusieurs mètres de haut.
D’ici décembre, environ 35 000 m³ de neige seront stockés, assurant une épaisseur de 40 à 60 cm sur les pistes familiales et les zones débutantes.
« On ne sauve pas juste le ski, on sauve un territoire »
L’enjeu dépasse largement les sports d’hiver. Pour les élus, il s’agit avant tout de préserver l’économie locale.
« On ne sauve pas juste le ski, on sauve un territoire », insiste Lionel Gay dans Le Parisien.
Hébergements, commerces, restauration, écoles de ski et emplois saisonniers dépendent directement de ces débuts de saison réussis.
Face à la fonte précoce des neiges naturelles, les stations misent désormais sur une combinaison : un peu de technologie, beaucoup d’anticipation et une bonne dose d’ingéniosité.
L’hiver avant l’heure
Cette neige fabriquée en plein automne n’est donc pas qu’une curiosité pour les familles en balade. Elle symbolise la mutation accélérée des stations françaises, contraintes de réinventer leur modèle pour continuer à faire rêver les amateurs de glisse.
Un paradoxe saisissant : en 2025, il faut parfois fabriquer l’hiver pour que l’esprit des sports d’hiver perdure.






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