Arcs 1800
La descente de la coupe du monde de ski filmée par un drone, une innovation de rupture pour la FIS

Pour la première fois depuis 2015, un drone est utilisé pour filmer une épreuve de Coupe du monde, ce week-end à Kitzbühel. Une initiative tentée pour moderniser l’image de la discipline.
Le drone, capable de se déplacer à 100 km/h, permet d'avoir une réalisation plus spectaculaire et immersive lors d'une descente.
Aleksander Kilde dévale la Streif à toute vitesse. Le skieur norvégien, vainqueur de la mythique descente de Kitzbühel vendredi devant les Français Johan Clarey et Blaise Giezendanner, n’est pas tout à fait seul dans sa folle course vers la victoire dans la station autrichienne. Au-dessus de lui, un drone suit les courbes qu’il dessine dans la neige du Tyrol. Avec comme mission d’offrir un point de vue inédit et spectaculaire sur l’effort des athlètes sur ce mythique tracé.
Des images spectaculaires, qui donnent l’impression de voir la course du point de vue d’un oiseau particulièrement alerte et joueur, largement mises en avant depuis le début du week-end de compétition par les différents diffuseurs de l’événement. « Qu’elles sont belles, ces images filmées par drone sur la Streif de Kitzbühel », s’est félicitée sur Twitter Eurosport, détenteur des droits de la Coupe du monde de ski alpin en France.
Impressionnant, mais pourquoi avoir attendu 2022 pour offrir cette carte supplémentaire à une réalisation souvent critiquée pour son immobilisme ? La raison porte le nom d’une station italienne, théâtre d’une précédente expérimentation en décembre 2015 : Madonna di Campiglio. De l’autre côté des Alpes, un drone utilisé par la télévision s’était écrasé juste derrière le cador de l’époque de la discipline, Marcel Hirscher. Aucune conséquence physique pour l’intéressé, mais une très mauvaise publicité pour les drones qui avait incité la Fédération internationale de ski (FIS) et les organisateurs de courses à mettre l’idée en stand-by.
Mais en 2021, la FIS a changé de président, l’inamovible Gianfranco Kasper laissant sa place au plus moderne Johan Eliasch, ex-président de l’équipementier Head. Soucieux de dépoussiérer le circuit, le Suédois a lancé un groupe de travail chargé de repenser la diffusion de ces courses. Et les drones sont tout naturellement revenus dans les discussions.
« La seule manière de rendre à l’écran la vitesse de ce sport »
« On a besoin de nouveaux formats de production, et c’est la seule manière de rendre à l’écran la vitesse de ce sport, souligne Michel Vion, ex-président de la Fédération française désormais secrétaire général de la FIS. Il faut aller de l’avant et tester des choses. » Trois événements ont donc été retenus pour expérimenter le retour des drones : l’open de Laax de snowboard freestyle il y a une semaine en Suisse, les championnats du monde de vol à ski à Vikersund, en Norvège, en mars, et Kitzbühel en ski alpin.
Bien plus léger que son prédécesseur italien au tragique destin (environ 600 grammes, contre 11 kg), le drone utilisé par l’ORF, la télévision publique autrichienne, est dirigée par une équipe de quatre personnes qui travaillent ardemment sur la chose depuis un mois. L’un des membres du quatuor, Joachim Hausleitner, est en contact permanent avec les contrôleurs aériens. « Si, par exemple, un hélicoptère arrive, nous ne sommes pas autorisés à décoller ou à atterrir immédiatement », explique-t-il dans un article de l’ORF dédié au dispositif.
Daniel Ausweger, présenté comme une référence dans le domaine, est, lui chargé de piloter l’engin, lunettes connectées à la caméra sur les yeux. Plusieurs règles sont imposées à l’appareil, capable de filer à plus de 100 km/h : ne pas survoler le public, limité à 1000 personnes cette année en raison de la pandémie, ni les caméras fixes installées sur le tracé. « Si le brouillard se lève ou si le temps devient trop mauvais, nous nous interromprons », souligne Joachim Hausleitner.
Utilisé dès les entraînements jeudi malgré les chutes de neige, le drone est attendu de nouveau ce dimanche pour la seconde descente du week-end à Kitzbühel. Si certains spectateurs ont apprécié la réalisation plus immersive de l’événement, d’autres ont eu un peu plus de mal avec le concept. « Certains spectateurs se sont plaints d’avoir failli tomber malade », relève Stefan Hofmann, commentateur de la chaîne suisse SRF.
« Il ne faut pas systématiser la chose, souligne Michel Vion. On va finir par lasser si on le propose au passage de chaque skieur. C’est un outil très intéressant, à savoir utiliser de manière pertinente. » Avant, peut-être, d’imaginer une généralisation à l’ensemble du circuit.